Médecine, santé et société

Mécanismes de transport dans le néphron II

Rein 20 Apr 2012

Lorsque l'on multiplie le TFG, c'està-dire 180l/jour, par la concentration plasmatique de la substance filtrée, on obtient une quantité filtrée par unité de temps («load» = charge) ; par exemple pour le glucose, elle est de 160 g/jour et, pour l'ensemble des acides aminés, de 70 g/jour environ. Malgré la faible perméabilité du filtre glomérulaire à l'albumine (environ 0,01-0,05 %), on estime cependant que 1 à 3 g/jour (180 l/j * 42 g/l * 0.0001 à 0.0005) parviennent dans l'urine primitive. Les systèmes de réabsorption dans le néphron limitent ainsi l'excrétion de ces substances indispensables à l'organisme.

Le glucose est absorbé dans la cellule tubulaire contre un gradient de concentration (c'est-à-dire de façon active). Pour cela, il utilise un système de transport dans la membrane à bordure en brosse («carrier») ; simultanément le Na+ passe aussi dans la cellule («selon un gradient») (co-transport secondaire actif avec Na+). Le gradient du Na+ est à son tour maintenu contre la membrane basolatérale par la « pompe » à Na+ active (Na+-K+-ATPase). Le glucose quitte à nouveau la cellule par un mécanisme de diffusion facilitée.

Le glucose est normalement réabsorbé à plus de 99 %. La courbe de la concentration du glucose dans le tube proximal montre que la réabsorption s'effectue très rapidement au début du tube proximal, alors que la concentration du glucose devient très faible, quoique constante, vers la fin du tube. A ce stade, la réabsorption active augmente à l'extérieur de la lumière tubulaire et la « fuite » passive devient plus forte vers l'intérieur de la lumière tubulaire. Plus loin, en aval, le glucose peut encore être réabsorbé, car la concentration luminale est à nouveau supérieure à C∞ en raison de la réabsorption de l'eau.

La fuite mentionnée ci-dessus est le résultat d'une diffusion passive du glucose essentiellement au niveau des espaces intercellulaires mais également à travers les cellules dans la lumière. La réabsorption active Jact du glucose est saturable lorsque la concentration du glucose augmente ; elle est fonction, selon Michaelis et Menten, du taux de transport maximal (Jmax) et de la constante de demisaturation (Km) :
Jact = Jmax * C/(Km + C).

Lorsque C dépasse 10 mmol/l dans le plasma et l'urine primitive (par ex. dans le cas d'un diabète sucré), le système de réabsorption est saturé (Jact se rapproche de Jmax) et la courbe de concentration du glucose s'aplatit : cela se traduit par l'apparition de glucose dans l'urine définitive {glycosurie}.

La réabsorption des acides aminés est très voisine de celle du glucose. Il existe environ 7 systèmes de transport différents (généralement co-transport du Na+), de sorte que Jmax et Km peuvent varier en fonction de la nature des acides aminés et du transporteur («carrier»). La L-valine par exemple est très rapidement réabsorbée, la L-glutamine à peu près comme le glucose et la L-histidine relativement lentement. En conséquence, on peut considérer pour ces acides aminés que respectivement 99,9%, 99,2% et seulement 94,3 % de la quantité filtrée retournent dans le sang.

Une augmentation de l'excrétion des acides aminés (hyperamino-acidurie) apparaît en aval du rein lorsque la concentration plasmatique s'élève (saturation de la réabsorption) ou au niveau du rein en raison d'un transport défaillant qui peut être spécifique (par ex. cystéinurie) ou non spécifique (par ex. syndrome de Fanconi). Les acides aminés sont également absorbés, du côté sang, dans les cellules tubulaires, ce qui permet bien sûr une alimentation cellulaire, en particulier dans les parties distales du néphron.

Le phosphate, le lactate et le citrate, parmi d'autres substances, sont également soumis à une réabsorption secondaire active dans le tube contourné proximal (co-transport du Na+). Un cotransport Na+-Cl--K+ s'opère dans le néphron distal. L'acide urique et l'oxalate sont simultanément réabsorbés et sécrétés. Dans le cas de l'acide urique, la réabsorption domine (seulement 10% d'excrétion) et, pour l'oxalate, c'est la sécrétion (excrétion > quantité filtrée).

Les oligopeptides (par ex. le glutathion, l'angiotensine) sont si rapidement scindés par les peptidases luminales actives de la bordure en brosse (γ-glutamyltransférase, aminopeptidase M, etc.) qu'ils peuvent être entièrement réabsorbés sous forme d'acides aminés. Il en est de même pour le maltose qui est dégradé en glucose et réabsorbé sous cette forme.

Les protéines (albumine, lysozyme, β-microglobuline, etc.) sont réabsorbées par endocytose et soumises à une « digestion » intracellulaire lysosomale. Cette réabsorption est normalement déjà saturée, de sorte qu'une augmentation de la perméabilité glomérulaire aux protéines provoque une protéinurie.